SECOUSSE

Vingt-deuxième secousse

Poésie

• Bernard Dilasser ► Méduses, corps glorieux

  Des ciseaux, parmi les buissons de mai, et c’est la stupeur qui l’emporte...

• Dorothea Grünzweig ► Le retour des orgues traduit de l'allemand par Chantal Colomb & Margret Millischer

  Nous avons un pieu planté en nous même si nous vivons à côté et non pas en prison...

• Christian Hubin ► Quatre sans titre

  À han !, à hardes, à enflures étranglant – à Howl !, Howl !. En masses, en gouttes d’extase(s), en ultime définitif...

• Constantin Kaïteris ► Encore une fois nos voix mêlées sans cesse au monde

  ...À droite du soleil, il prit la rue Saint-Jacques. Dans ce dessin social, trouvez les sept erreurs. C’est le dieu faux fuyant en sandales à ailettes...

• Yves Leclair ► Aux portes du royaume

  Vigne vierge toute rouge. La première feuille morte entrée dans la chambre...

• Chen Xianfa ► 3 poèmes traduits du chinois par Claude Tuduri et Junfeng Zhang

  Ma mère de la campagne rapporta une botte d’épinards avec de la terre jointe aux racines, mais eu égard à ce que je lui dois, cette motte de boue appartenait aussi au cadeau...

Proses

• Pierre Ouellet ► Les Marches-Naturelles

  Je rentre dans mon enfance dès que je pénètre le moindre bois, qui est du temps bien plus que de l’espace, de la profondeur autant que de l’étendue : je passe entre les heures, les ans, les lustres quand je me glisse entre les troncs...

• Catherine Soullard ► Des bringues d'un autre monde

  ...il peut dire n’importe quoi, parler des esprits, des petits êtres de la forêt, des forces transfixiantes, elle lâche, oublie, abandonne toute rationalité, ici règnent les plantes et les bêtes, les saintes, les sorcières, et les fées, les druides, ici la magie est blanche, jamais noire...

• Joël Vernet ► Carnets du lent chemin

  ...Nous vivons sur des ruines qui prennent la forme de cathédrales, de palais, d’architectures indestructibles, mais vieillir c’est savoir que ce Présent est rongé de l’intérieur, que toute vie n’est qu’une immense termitière où rôdent la mort et la vie, d’un même élan.

Essais

• Christian Doumet ► Les partis politiques ne pensent pas

  ...Pour comprendre cette cristallisation de parole, d’autorité et de durée en « parti », il faut remonter à la Terreur, et précisément à l’évolution du club des Jacobins. D’abord société de réflexion, mais devenu très vite un lieu majeur d’influence doté de réseaux dans tout le pays ...

• Paul Louis Rossi ► De la Frontière : Poésie ou Prose

  ...la poésie est une tentative d’abstraction du langage afin d’en contourner la communication immédiate. Je n’ose parler d’une sacralisation de la langue. Cependant je pense à la Bible et surtout à L’Apocalypse de Jean....

Aux dépens de la Compagnie

• Maylis de Kerangal ► Réparer les vivants

  ...et l’on se signait en silence pour regarder passer ce cortège extraordinaire, le carrosse noir tiré par six chevaux en grand deuil, caparaçonnés de draps et de surplis précieux, l’escorte des douze cavaliers portant flambeaux, les longs manteaux noirs et les crêpes pendants...

• Frédéric Werst ► Ward I^er - II^e siècle

  ...C’est ainsi que le Néant apparut et qu’il constitua l’armée de Margôn. Le Néant lança son attaque contre le royaume de la Paix, et il répandit les couleurs de la mort sur les continents, les mers et toutes les créatures qui y vivaient....

Carte blanche ► L'hôpital, etc.

• Thomas Augais ► Giacometti et le chirurgien

  ...Dans les dessins d’Alberto Giacometti, un « fil infini  », le trait du crayon, court sur la blancheur du papier, comme celui que la mère d’Alberto, dans le chalet de Stampa, tente de faire passer par le chas de l’aiguille....

• François Boddaert ►Notes pour « Une chambre à moi »

  ...être retiré du monde l’instant d’une fragilité essentielle, pour s’y reclure, certes, mais surtout pour s’y refaire – que l’on soit là créateur ou malade, les deux statuts dénotant une fragilité momentanée essentielle – un état de grande vulnérabilité, d’épuisement physique et/ou mental...

• Alain Charlier ► Malade malgré lui, médecin... imaginaire ?

  ...Dans l’état d’anorexie où mes collègues et moi-même nous sommes, la qualité et la présentation des repas sont une maltraitance biquotidienne. Conseillé par les diététiciennes du service, je redécouvre le Coca Cola bien glacé, plaisir oublié depuis environ 40 ans...

• Maylis de Kerangal ► Entretien avec Anne Segal et Gérard Cartier

  ...Il y a quelque chose de grec dans ce livre, de grec archaïque. Il y a cette vague au début, et c’est le héros qui surgit de la mer ; il y a l’image de ce corps qui est comme un guerrier blessé (...) ; il y a quelque chose de grec parce qu'il y a le chant de belle mort, rite funéraire grec...

• Philippe Di Maria ► Symphonie n°1, L’hygiénique, de Louis-Ferdinand Céline

  ...Toujours hygiéniste dans l’âme, il prodiguera moult conseils à ses amis, et en particulier à Albert Paraz, à qui il rappellera obstinément de ne boire que de l’eau, d’avoir une bonne hygiène de vie et de surveiller « son Vernes»...

• Luisa Futoransky ► Quarantaine de la dame traduit de l'espagnol par Gérard Cartier 

  ...Là dessus nous voyons madame Laura (Falena) Kaplansky, patiente au diagnostic réservé, dans la Salle Hardy de l’Hôpital Saint-Louis, un carton d’identification à la main et un pyjama à rayures noué au-dessus de la taille par un gros cordon. – Déshabillez-vous...

• François Garcia ► Une approche confidentielle

  Au début, il y a une représentation, je vois la scène, le décor, simultanément j’entends les voix des personnages, description et écoute étroitement mêlés.C’est la transcription de cette scène qu’exige l’écriture. ..

• Marc Gentili ► Pour une histoire de l'Hôpital

  ...Lors de la confiscation des biens de l’église en 1792, l’hospice passera sous la tutelle de l’État en prenant le nom d'Hospice de l’Ouest. De nombreuses améliorations sont constatées : il n’y a plus qu’un seul patient par lit...

• Jean-Louis Giovannoni ► Visites d'amitiés

  ...Dans la salle commune, ça sentait l’éther, l’urine mélangés à des effluves d’eaux de toilettes. Ma mère rayonnait au milieu de tout cela. La maladie ne la déborderait pas...

• Vincent Gracy ► Après 15 ans

  ...il passait peu de voitures et qui faisaient peu de bruit, roulant presque au pas, comme si les conducteurs obéissaient d’instinct à l’implicite injonction de bienséance émanant des lieux. En face de la clinique, des entreprises de pompes funèbres affichaient la liste de leurs services dont la teneur globale pouvait se résumer à : « Mourez ! Nous ferons le reste ! » ...

• Bruno Grégoire ► Mise en pièces d’une lettre par la médecine

  Retour à la température – elle a retrouvé un thermomètre : 99° ! Je la rassure : « Ça m’arrive très rarement. Tant que je n’entre pas en ébullition, ça va. » – Non, non. Là, y’a quelque chose qui va pas ! me rétorque-t-elle le plus sérieusement du monde. Deuxième essai : 98°… Je l’encourage : « Bon, c’est déjà mieux. On progresse... »

• Michelle Labbé ► Revigorer

  Le monde s’était effaré mais les vieilles, noires, debout, se battaient contre la translucidité des peaux, les cernes violines, la déroute des souffles, les pus, les entérites, ayant renoué avec les plantes. De ses immenses feuilles céladon, l’une s’agrippait à la pente des fossés, blanche et velue à l’envers, destinée ensemble à être emplâtre et boisson...

• Jacques Lèbre ► Sonnets de la tristesse

  Je vais bientôt retourner dans le parc à vieillards. Je n’aurai pas la joie de l’enfant qui va au zoo. Désormais ma vieille mère marche un peu voûtée...

• Gilles Ortlieb ► Pavillon Moïana

  À l’approche d’Halloween, la queue débordait jusque sur le trottoir de la rue de la Convention, devant la boutique À la fête : tenues de sorcières, masques, chapeaux de paille, fausses citrouilles, avec un « grand choix de déguisements en sous-sol ». Juste en face d’une succursale des Services funéraires de la ville de Paris, éclairée jour et nuit.

• Catherine Soullard ► Ouverte ou fermée ?

  ...Le tissu qui balance de part et d’autre du corps, c’est l’ego qui parade en caniche au rythme des jambes. S’exonérant du boutonnage, les porteurs de blouses ouvertes le font en général aussi du salut et du sourire, ils regardent haut, droit devant...

• Cécile Vargaftig ► Garches

  ...Un jour, un mari a dit de sa femme, qui était ici : J’ai épousé une Rolls Royce, je me retrouve avec une 2CV. Ça nous a fait mal. On n’est pas des voitures, même si parfois il y a des accidents...

• Martin Winckler ► La Ventriloque

  ...Il regarda la sage-femme dans les yeux. – À Alger, j’ai fait beaucoup de… « curetages » en urgence. Surtout la nuit. Elle hocha la tête. – Je m’en doutais un peu…

La guillotine

• François Boddaert ► Une passion « fin de siècle »

  ...C’est donc peu dire que nos gensdelettres avaient la tête politique, mais une tête en ébullition, chacun tentant de s’y retrouver entre les options nombreuses (souvent issues du « darwinisme social » alors en vogue) qui agitent l’éruptive époque...

Zarbos

• Jean-Louis Gerbaud ► Cézanne / Hantai

  Le manque, la lacune, la réserve comme ouverture possible. Il y a ce qui, continuellement, se dérobe, rôde inlassablement sans se dire, mais ne cesse de réclamer « sa » forme...

• Karim Haouadeg ► Et je hais tous les hommes - sur L'atrabilaire amoureux de Jacques Kraemer

  ...Non seulement on rit aux sautes d’humeur et aux emportements de ce personnage à l’humeur « alcestueuse », mais on a le sentiment de redécouvrir l’œuvre de Molière. Car le metteur en scène énonce en passant des choses essentielles, souvent ingénieuses, le plus souvent convaincantes, sur Le Misanthrope et sur chacun des personnages...

• Éric Pineau ► Forêt - Présentation de Jean-Marie Blas de Roblès

  ...Ces aubes surexposées à dessein dans les photographies d’Éric Pineau, ce flou entrevu, ces éclaircies imprécises au plus profond d'inextricables futaies, sont des chemins, c'est-à-dire, toujours, des mondes possibles...

• Catherine Soullard ► Précaire - sur Le sous-bois des insensés de Martine Deyres
  

  Autant de figures, de phrases, d’images qui tentent de frayer un chemin à travers le dédale de la souffrance humaine, maladie psychiatrique et douleur psychique et, partant, de tenter de donner accès à plus d’humanité...

• Catherine Soullard ► Difficile liberté - sur Une famille heureuse de Nana Ekvtimishvili et Simon Grosse

  ...C’est un grand film qui n’a l’air de rien – une vie de famille, même si elle est diablement mouvementée, tout le monde connaît. Là où il est poignant, c’est dans la manière subtile et vraie avec laquelle les réalisateurs mettent en scène la progressive conquête de liberté de Manana....

Notes de lecture

• Serge Airoldi ► Rose Hanoï - Note de lecture de François Bordes

  ...elles sont toutes là, même les absentes, même les inconnues, même les tristes, même les grises – c’est un tourbillon, une épopée de la couleur, un palais, une encyclopédie chatoyante et charnelle. Trépidante...

• Anthologie ► Taipei. Histoires au coin de la rue - Note de lecture de Karim Haouadeg

  ...huit nouvelles, toutes excellemment traduites, écrites pour la plupart dans les années 2000-2010. Huit regards tout à fait singuliers, huit tentatives d’épuisement d’un lieu inépuisable...

• Jean-Paul Bota ► La boussole aux dires de l'éclair - Note de lecture de Pascal Commère

  ...L’élégance du discontinu, en prise directe avec ce qui demeure d’une présence dans le détail, sans compter les réminiscences qui viennent s’ajouter à ce qui est, ou surnage. Le tout servi par une écriture qui se déploie dans ses heurts et imbrications...

• Yves di Manno et Isabelle Garron ► Un nouveau monde - Note de lecture d'Éric Dayre

  ...Cette anthologie (...) n'est donc pas neutre et elle choisit nettement ses orientations, ce qui a le très grand mérite, en évitant toute polémique, de permettre au lecteur de comprendre les grandes tensions et oppositions qui ont parcouru le champ....

• Christian Doumet ► Paris et autres déambulations - Note de lecture de François Boddaert

  ...la marche en ville (et pas qu’elle) est pour l’écrivain l’espace idéal d’une quête de matière à penser le monde dans la multiplicité des fragments de vie aperçus, humés, observés, et dont l’écrivain tente d’interpréter les ressorts...

• Fabienne Raphoz ► Blanche baleine - Note de lecture de Gérard Cartier

  ..Blanche baleine, le nouveau recueil de Fabienne Raphoz, se situe dans la continuité du précédent, sinon par son écriture, du moins par ses thèmes, une appropriation de la nature et de ses créatures, (...) – Fabienne Raphoz est une lointaine filleule du grand Buffon...

• Franck Venaille ► Requiem de guerre - Note de lecture de Gérard Cartier

  ...de grands revenants traversent le livre en coup de vent, Villon par exemple, ou un rebouteux nommé Simon Freude, qui se fait la main à Trieste en disséquant les glandes sexuelles des grenouilles avant d’entreprendre son œuvre majeure, un Guérir de l’envie de guérir en cinq volumes...

• Nina Yargekov ► Double nationalité - Note de lecture de Florence Balestas

  ...En même temps qu’un récit plein de rebondissements, écrit dans une langue parfaitement maîtrisée mais parfois étrange, Nina Yargekov nous offre surtout une quadruple vision du monde, plus ou moins lacunaire selon le point de vue, français, « lutringien », hongrois ou « yasigien »...