SECOUSSE

Dixième secousse

Poésie

• Alain Andreucci ► Or tel le cœur...

  Or tel le cœur s’étant le souvenu. Sa clameur la voilà amour songé son que parler tressaille. Dans l’écheveau des vies ou que trembler pose sa voix vivante d’infirme un infini...

• Romain Fustier ► L'infini de poche

  les groseilles sont de la pluie d’été en grappe    des gouttes de sang acide     des baies où croissent les maquereaux les bancs de nuages tombant sur les poissons     sur la mer...

• Antjie Krog ► Une syllabe de sang traduit de l'afrikaans par Georges-Marie Lory

  les fossiles déterrés ne décrivent pas mes yeux bleus passant devant tes yeux tes yeux noirs évitant mes yeux...

• Paul Le Jéloux ► 5 poèmes

  Je suis un homme neuf et pourtant déjà vieux Un vieillard presque qui a bu les trois quarts de son verre Il y a de la gomme dans l'eau, des oiseaux dans l'azur...

• Nimrod ► Sur les berges du Chari

  Le bac accoste enfin dans la bouse les roseaux et les mimosas aux fleurs roses C’est l’enfance du monde exposée sur le rivage...

• Paolo Universo ► Delenda Trieste traduit de l'italien par Danièle Faugeras et Pascale Janot

  hélène plus belle que la lune blanche oie en blue-jeans ébahie...

Proses

• Lionel Bourg ► L'échappée

  Je ne jure, ne respire que par lui, qui rougit, bredouille au micro lorsque l'un des reporters des actualités cinématographiques l'abreuve de compliments. Lyrique, prompte à entretenir la jouissance identificatrice d'une foule en manque d'odyssée, la presse ne tarit d'ailleurs pas...

• Georges-Olivier Châteaureynaud ► Trop bleu

  J’étais peintre, ou je l’avais été. L’étais-je encore un peu, ou plus du tout ? Un jour, en retombant sur ma vieille palette encroûtée de couleurs durcies et empoussiérées, j’avais eu un choc. J’avais farfouillé dans ma caisse de tubes, j’avais retrouvé le cyan, vide...

Essais

• Hubert Haddad ► La brûlure et la patience

  Il y a deux façons de lire : en fermant ou en ouvrant, la première étant réservée aux illettrés du cœur. Le Coran est un livre musical, violent, remplis de fulgurances inspirées et des pires analepses. Treize siècles après le passage de l’ange...

Aux dépens de la Compagnie

• Jean-Marie Blas de Roblès ► La bibliothèque de Babel

  C'est ici le règne des nuées. Une brume filandreuse enveloppe les choses d'une pourriture noble qui voile les contours et embue l'intellect tout autant que le verre de mes lunettes. Cet étage, fort différent des autres, est propice aux égarements de la raison, à ses fantômes importuns ...

• Wolfdietrich Schnurre ► Messages clandestins traduit de l'allemand par Raoul Bécousse 

  Parler des griffes des anges est redoutable ; reconnaître leur trace en de vastes espaces d'air respiré condamne à penser aux squelettes d'araignées...

Carte blanche

• Jean-Marie Blas de Roblès ► Entretien avec Anne Segal et Gérard Cartier

  ...la mythologie mondiale a posé à l'origine des questions qui sont toujours les nôtres aujourd'hui, il est intéressant de se les reposer à soi-même telles qu'elles ont été posées et d'y répondre à sa propre façon...

• Jean-Marie Blas de Roblès ► Orient roux

  C'est ce soir que le peintre Giotto frôle au plus près une comète très ancienne, Flamboyant surcroît de ténèbres à l'obscurité pâle de nos jours...

• Gérard Cartier ► Mireille Provence

  Pourquoi avoir voulu lui donner un visage ? L’article est illustré par l’un de ces portraits ténébreux et interchangeables dont les chroniqueurs de cours d’assises se plaisent à affubler leurs héroïnes. Mireille Provence ? Mireille Provence cette bourgeoise sans âge...

• Éric Dussert ► « Quinze Grammes », caporal sur Jean Arbousset

  ...ludion plongé dans la boue des tranchées de la Grande Guerre, bon compagnon et poète qui n’eut guère le temps de laisser pommer son œuvre, fauché qu’il fut d’une balle en plein front après avoir fait imprimer à Paris quelques exemplaires d’un recueil de poèmes du front...

• Muriel Friboulet ► Campagne (suite)

  Des  coups de sang, il y en eut tout de même encore assez, dans la Bosnie des Habsbourg. Petar Princip s'y colleta dès ses quinze ans, avec son père et ses frères. Cela ne lui était point désagréable. Un jour de chasse aux canards, le grand-père Princip fut touché mortellement et la maisonnée crut longtemps qu’il était tombé en rebelle....

La guillotine

• Pétra Mordouce ► Les cadavres exquis boiront le vin nouveau !

  Il y a quelques mois, comme il le fait de temps à autre – pour se donner bonne conscience, ou un peu de distinction, comme on épinglait autrefois un œillet à sa boutonnière – Le Monde publiait dans son supplément littéraire une notule sur la poésie....

Zarbos

• Jean-Patrice Courtois ► Diane Arbus, Emerson et Platon

  Diane Arbus n’a jamais photographié de monstres parce qu’elle donne à une question de Parménide, dans le dialogue de Platon du même nom, une autre réponse que celle de Socrate. Cette réponse d’artiste s’est démultipliée en chaque photographie...

• Sophie Daoud ► Extimes

  Je me souviens qu’elles étaient montrées sans prétention, resserrées, mais que chacune racontait à elle seule une histoire, un saisissement du monde à la fois réel et merveilleux (on pense à Buñuel, par exemple)...

• Karim Haouadeg ► La poudre aux yeux sur Rituel pour une métamorphose de Saadallah Wannous

  La pièce n’est qu’une suite de clichés sur l’Orient millénaire, ses harems, ses despotes, l’emprise de la religion, l’incapacité congénitale des Arabes à développer une pensée rationnelle et autres fariboles du même type...

• Catherine Soullard ► En quête - sur Stories we tell de Sarah Polley et Sugar Man de Malik Bendejlloul

  ...d’images en images, d’entretiens en entretiens, de fragments en fragments, le film avance, avec la fragilité d’une œuvre en verre, tendu de bout en bout par un désir vital, une envie forcenée de vérité, et un style. Au nom de la mère, du père, et du cinéma.

Notes de lecture

• Jean-Pascal Dubost ► Nouveau fatrassier - Note de lecture de François Boddaert

  Un livre qui raboute les éparpillements de l’écriture, les aventures de la curiosité, les explorations du savoir, comme tel cabinet de curiosités en quête d’une synthèse du monde immédiat autant que de soi-même immergé dans ce monde ...

• Philippe Jaccottet ► Taches de soleil, ou d'ombre - Note de lecture de Gérard Cartier

  Combien de pages, dans l’œuvre de Philippe Jaccottet (...) pour saisir l’instant fuyant de l’aube ou du crépuscule où ombre et lumière se mêlent, combien de peintures d’un motif – ce sont ses Nymphéas, son Bois de pins – qui mieux que tout autre définit son écriture ...

• Patrick Laupin ► Chronique d’une journée moyenne - Note de lecture de François Boddaert

  Autant, constats à l’appui, prévenir le lecteur que ce journal au bord du gouffre balaie, avec une acuité d’analyse et une fermeté de langue, les moindres recoins de la difficulté d’être dans un monde qui paraît alors sans recours...

• Sophie Loizeau ► Caudal et le roman de Diane - Notes de lecture de Gérard Cartier

  ...plutôt que Diane, sa proie, une proie qui jouit de ce qui la menace (...) ; et Suzanne aussi bien, elle qui répète en plein air, face à la forêt, la scène du bain, suscitant et chassant à volonté l’ombre d’un voyeur – le lecteur peut-être...

• Jean Malrieu ► Lettres à P. Dhainaut, J. Ballard, P.A. Jourdan - Note de lecture de Pascal Commère

  Retiré et comme à l’écart sur ce coin de terre occitane élu de longue date, Malrieu reste celui qui n’habite pas, se tient au bord, en éveil. Pour lui, la vie n’est pas séparable de l’écriture qu’elle devance dans l’attente...

• Béatrice Marchal ► L'épreuve des limites - Note de lecture de Pascal Commère

  Fruit d’une sensibilité acceptée, le poème en sort tout parcouru de germinations et de courants souterrains. Ouvert au vivant, et porteur d’une force d’espoir sans nul tapage mais d’autant plus repérable qu’elle sourd du langage comme naturellement et l’arme...